« Intimement féministe » par l’effrontée Anaïs

La minute coquine

ou le féminisme et l’intime

Le féminisme interroge aussi l’intime. Comment se comporter de façon féministe chez soi, notamment au lit ? Petit cours de sexologie adapté au plaisir des femmes.

Comme nous n’aimons pas plus l’hétérosexisme[1] que le sexisme, précisons, en préambule, qu’il nous semble évident que le plaisir peut se prendre entre toutes sortes de personnes consentantes, entre hommes, entre femmes, en mixité, seul-e, à deux ou à plusieurs, du moment que cela se passe dans le consentement.

Mais dans cet article, nous allons nous concentrer sur la façon de faire plaisir à une femme en nous adressant spécifiquement aux hommes, et donc, ici, aux hommes hétérosexuels.

Nous avons souvent entendus nos contemporains masculins hétéros s’interroger sur la façon de vivre leur rapport aux femmes et d’avoir une vie affective et sexuelle épanouie, dans une société où les repères évoluent. Ce qui était une évidence hier ne l’est plus aujourd’hui, car le féminisme déconstruit la notion de rôles genrés. C’est en effet plus simple de coller des étiquettes mais c’est tellement plus loin de la réalité de chacun-e que ça en devient faux. C’est pourquoi nous soulignons l’importance de la variable individuelle dans la construction identitaire. Il n’y a pas UNE façon de fonctionner qui serait soit féminine, soit masculine. Il y a des individualités à respecter qui ne dépendent pas de l’organe qu’elles/ils ont entre les jambes.

Comment faire quand on est un homme hétéro plein de bonnes volontés, et qu’on veut faire plaisir à une femme ? Si on part du principe que les hommes et les femmes ne sont pas différent-es, les sexes sont pourtant distincts. N’y a-t-il pas des manières spécifiques de faire plaisir à un sexe de femme ?

« Les femmes, ces petits êtres sensibles ? »

Nous sommes toutes et TOUS des êtres sensibles. Nous avons des émotions, nous réagissons à notre environnement et à la façon dont on nous traite, nous avons des désirs qui peuvent être assouvis ou frustrés et nous avons une façon, toute personnelle, de recevoir des attentions.

Donc, oui, nous sommes sensibles mais, non, nous ne sommes pas des petites choses émotives ou hystériques.

Concrètement, ça veut dire qu’il va falloir caresser les neurones[2] de votre partenaire, dans le sens de la dendrite[3] et créer toute les conditions propices au lâcher prise. Car sans lâcher prise, pas de plaisir !

La condition nécessaire à ce laisser aller sensoriel est d’être bien, en confiance. Il faut pour cela un cadre où les partenaires se sentent prises en compte, écouté-es et libres du « oui » et du « non ». Car c’est en laissant la possibilité d’un « non » qu’on obtient une adhésion franche et pleine de promesses.

Le désir et l’excitation

Il est important de faire une petite distinction entre désir et excitation. Les deux termes sont très proches et peuvent aller l’un avec l’autre mais ce n’est pas systématique. La confusion entre les deux est classique, prenons donc un instant pour les distinguer.

Le désir, c’est cette émotion qui se traduit par une envie de sensualité.

Pour alimenter le désir, vous pouvez vous enquérir des fantasmes de votre partenaire. Ce sont de précieux indices pour comprendre ce qui permettra de partager un moment agréable.

L’excitation, c’est la réaction sexuelle plus ou moins « mécanique » du corps, qui se caractérise par une érection chez les hommes… et chez les femmes aussi à vrai dire. Le clitoris – nous lui accorderons plus bas l’attention qu’il mérite – se dresse et grossi et les lèvres se gonflent. Le vagin sécrète alors de la cyprine, liquide translucide qui aura pour but de rendre les contacts et les frottements plus agréables grâce à son effet lubrifiant.

Sachez que, tout comme il peut y avoir des érections du pénis purement mécaniques (sans désir), comme par exemple les érections réflexes du matin ou désordonnées du début de la vie sexuelle, il peut également y avoir une érection du clitoris et une lubrification de la vulve… sans désir. Les femmes ne sont pas aussi cérébrales que ce qu’on prétend. L’organe sexuel féminin peut se mettre en branle s’il est stimulé. Mais cela ne signifiera pas pour autant qu’il y a du désir à avoir un rapport sexuel. La seule façon de le savoir est d’être attentif à sa partenaire, à son avis et à ses envies.

Les zones érogènes

Ça y est nous y sommes ! Elle est là, emplie de désir et excitée. Ses yeux pétillants plongés dans les vôtres, sa façon de vous rendre sourires et regards complices, vous indique que l’alchimie se fait. Vous en êtes au stade où je dois vous confier le secret, le plus angoissant et le plus merveilleux qui soit, concernant la sexualité : il n’y a pas de mode d’emploi !

C’est angoissant parce qu’il n’existe pas de recette miracle, de série de positions ou de zones à dorloter spécifiques pour arriver immanquablement à l’orgasme… ce qui ouvre tous les champs des possibles. La sexualité est un univers libre pour votre créativité. La seule limite est le consentement.

Il existe bien ce qu’on appelle les « zone érogènes », ces parties du corps où la peau est plus fine et où les terminaisons nerveuses sont plus nombreuses et sensibles, la bouche, les seins, la nuque, les mamelons, l’intérieure de la cuisse, les oreilles, le bas du dos, les lèvres de la vulve… la plante du pied ? Un massage à cet endroit peut faire grimper aux rideaux une personne réceptive… ou provoquer de violentes crises de rire chez les plus chatouilleuses.

De façon générale, les caresses, les baisers et toutes les attentions permettent de faire monter l’excitation et donc une bonne lubrification du vagin tout en laissant le temps au clitoris de gonfler et d’augmenter la sensibilité et les sensations. Pour information : la lubrification du vagin commence environ dans les 10 à 30 secondes après le début de l’excitation. Une femme de 20 ans a besoin d’environ 15 secondes pour lubrifier complètement son vagin. Ménopausée, il lui faudra 3 à 4 minutes. Mais il n’y a pas de règles pour ce temps de réchauffement.

Le privilège féminin

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En matière de sexualité, nous avons un privilège : un organe uniquement dédié à notre plaisir. Cet organe, nous en parlons depuis tout à l’heure, c’est le clitoris ! Souvent connu pour sa partie visible, son gland, en haut de la vulve sous le prépuce clitoridien.

Cet organe a une partie interne et des racines qui continuent dans les lèvres et qui vont innerver l’entrée du vagin.

Pas si différent-es

Le sexe féminin vous paraît peut être terriblement différent de ce que vous avez entre les jambes, plein de plis, de recoins, de cachettes. Pour commencer, regardez-y de plus près… les organes sexuels masculins et féminins ne sont pas si différents. On retrouve les mêmes parties des deux côtés :

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L’anatomie du clitoris ressemble beaucoup aux corps caverneux du pénis avec des aréoles qui se remplissent de sang pour se gonfler. Plus il est gorgé, plus il apporte de sensations.

La partie la plus sensible chez les hommes est le gland. Chez la femme c’est pareil. Notre « gland » étant la partie émergée du clitoris.

À la naissance, vous avez un prépuce, nous aussi.

Les hommes sont très sensibles au niveau des testicules. Pour notre part, la zone de sensibilité qui pourrait être équivalente se trouve à l’intérieur des lèvres. C’est-à-dire la zone entre le clitoris et le vagin. Là où se logent les branches du clitoris.

Le clitoris, avec sa partie externe mais aussi interne, réunit 7000 à 8000 terminaisons nerveuses. Par comparaison, le coussinet de votre index n’en comporte que 3000.

Sachez que lors de l’évolution de nos fœtus, il fut un temps où nous avions le même sexe qui évoluera au fur et à mesure de la grossesse, en partant de la même base et des mêmes tissus, pour créer les organes sexuels masculins ou féminins.

La taille du sexe

La question que vous vous posez tous ! Étrangement, ce questionnement se focalise souvent sur votre sexe masculin, partant du principe qu’un grand sexe devrait donner plus de plaisir à une femme. Soyons pragmatiques :

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Pensez-vous que vous pourriez mettre la même quantité d’épices dans tous ces pots ? Non. Et bien pourquoi s’imaginer que tout peut ou doit rentrer dans un vagin ?

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Le vagin est un conduit qui a une entrée au niveau de la vulve et un fond, le col de l’utérus. La profondeur moyenne du vagin est de 8 à 10 cm. En état d’excitation, il peut mesurer 12 cm en moyenne.

L’orgasme vaginal, orgasme ultime ?

Le vagin et le clitoris ne sont pas dissociés. Les parties les plus sensibles du vagin sont celles où le clitoris rejoint la paroi vaginale.

Ces dernières années on a beaucoup entendu parler du point G. Les médias nous ont promis une zone magique qui ferait décoller n’importe quelle femme. Il est vrai qu’il existe une zone particulièrement sensible dans le vagin, entre 3 à 8 cm à l’intérieur. Au toucher, c’est un peu plus rugueux que le reste de la paroi, une petite boule de moins d’un centimètre qui augmente avec la stimulation.

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Cependant, n’en faites pas une quête indispensable. Ce n’est pas un bouton On/Off. Il est tout à fait possible de donner du plaisir à une femme même sans débusquer cette zone.

N’hésitez pas à poser des questions ! Même si vous souhaitez éviter les grands discours, rien n’empêche de s’enquérir d’un « ça va ? », « c’est bon ? », « comme ça tu aimes ? »

Chaque personne est différente. Votre plus grand atout est votre écoute. Vous ne pouvez pas deviner à sa place ce qui peut lui faire plaisir. Discuter est à la fois une très bonne façon de savoir comment faire plaisir mais aussi une très bonne façon de faire monter le désir et l’excitation.

L’astuce imparable est de considérer votre partenaire comme votre égale, une être vivante et unique.

N’oubliez pas de prendre soin de votre santé : Protégez-vous en utilisant un préservatif féminin ou masculin, ou en allant faire les tests nécessaires dans les délais qu’il faut[4].

Prenez soin de vous et amusez-vous bien !

Par Anaïs Haddad, membre du bureau des effronté-e-s


[1] « L’hétérosexisme est le système de comportements, de représentations et de discriminations favorisant la sexualité et les relations hétérosexuelles. Il peut comprendre la présomption que chacun est hétérosexuel ou bien que l’attirance à l’égard de personnes de l’autre sexe est la seule norme et est donc supérieure. L’hétérosexisme inclut ainsi les discriminations et les préjugés qui favorisent les personnes hétérosexuelles aux dépens des gays, lesbiennes, bisexuels. » wikipédia. Par exemple, ce serait évoquer la sexualité, en ne parlant que de pratiques hétérosexuelles, en laissant entendre que c’est tout ce qui existe.

[2] Les neurones sont les principales cellules du système nerveux, dont le rôle est d’acheminer et traiter les informations dans l’organisme.

[3] « Une dendrite est un prolongement filamenteux du neurone servant à recevoir et conduire l’influx nerveux. » http://www.futura-sciences.com

[4] https://www.sida-info-service.org ou par téléphone au 0 800 840 800 (anonyme et gratuit depuis un poste fixe, accessible 7 jours sur 7, 24 heures sur 24)

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